Avoir peur ou non de la confusion sein/tétine ?

Quand le bébé allaité semble plus attiré par le biberon, voire, refuse le sein, certaines personnes évoquent la possibilité de cette fameuse « confusion sein-tétine ». Ce qui sous-entend donc qu’il ne faut JAMAIS proposer un biberon à un bébé allaité de peur qu’il refuse ensuite le sein.

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Photo illustrant un article de LLL France sur le refus de téter

Pour ma part, je n’aime d’abord pas le mot « confusion ». Nos bébés sont loin d’être idiots et ils ne se trompent pas si facilement que cela (si l’on cherche le sens de confusion sur internet, on va tomber pêle-mêle sur les mots désordre, honte, défaut de clarté, destruction, mélanger…). Au contraire, ils sont même tellement futés qu’ils vont choisir ce qui sera le plus confortable pour eux. S’ils ont du mal à être efficaces dans leurs tétés (pour des raisons qui peuvent être extrêmement variées : naissance avant terme, même minime, ou « mouvementée », effets d’un anesthésiant, freins de langue et/ou de lèvres, etc.) ils vont donc préférer ce qui sera le plus agréable pour eux : cela peut être le biberon. A l’inverse, si le lait leur parvient à profusion par le sein de maman et qu’ils ont du mal à gérer cette grande générosité, ils peuvent aussi préférer l’afflux plus « tranquille » du biberon. Vous l’aurez compris, j’emploierai plus volontiers le terme « préférence tétine-sein ».

Maintenant, est-ce une réalité ? Est-il vrai que des bébés vont avoir ce comportement et est-il vrai qu’un seul biberon peut interférer avec un allaitement serein ? Bon nombre de professionnels de santé disent que cela n’existe pas. Bon nombre de mères affirment l’inverse. Qui croire ? Mes propos n’engagent bien sûr que moi, puisque je dirai que tout le monde a raison. Trop facile, et même démagogique (promis je ne me présente à aucune élection 😉 ) puisque je ne me mets ainsi personne à dos ! Si on pouvait arrêter de faire des généralisations, notamment en matière d’allaitement maternel, je serais au paradis : chaque bébé est unique, chaque femme est unique. Tout va donc dépendre de la manière qu’ils auront chacun d’inter-agir ensemble. Et également de la manière dont sera donné le biberon.

Il est indéniable que la succion au sein et celle au biberon n’ont rien de commun : la première fait intervenir plus d’une vingtaines de muscles, la second juste les lèvres et un peu la langue ; la première demande à ce que la bouche soit grande ouverte, la seconde peut être effective même avec des lèvres presque serrées. Des bébés vont passer sans aucune difficulté du biberon au sein et vice-versa. Ils savent adapter leur succion à chaque stimuli différents. D’autres vont commencer à « pincer » davantage le sein de maman ; on peut alors leur apprendre la différence, « rectifier » le tir en les invitant à ouvrir plus grand la bouche ; pour peu que ce signe-là soit le premier qui apparaisse, et non pas un refus brutal du sein…  Si grève de tétée il y a (puisque c’est ainsi que se nomme cet arrêt soudain de l’allaitement, rien à voir avec un sevrage), les conséquences peuvent être véritablement néfastes à la poursuite sereine de l’allaitement.

Petite histoire vraie : G. a du reprendre son travail alors que bébé E. avait 3 semaines. Elle avait un Réflexe d’Ejection Fort (REF) et bébé E. un frein de langue serré. Nous avons discuté ensemble de la possibilité de cette préférence. Les parents de Bébé E. ont choisi de donner le lait avec un DAL (Dispositif d’Aide à la Lactation) au doigt, le papa s’attelant à la tâche puisque c’était lui qui gardait bébé pendant les absences de sa maman. Par la suite, le frein de langue a été coupé, le REF s’est apaisé, bébé E. a grandi et… a pris aussi bien le biberon chez la nounou que le sein avec maman. Franchement, je ne sais pas ce qui serait arrivé si on était de suite passé par la case biberon. Peut-être rien au final. Mais qui peut savoir ? Dans le doute, je préfère informer et laisser le libre choix aux parents.

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Bébé E. prend son lait avec son papa et une sonde au doigt

Informer, cela veut aussi dire qu’il existe une manière particulière de donner le biberon à un bébé allaité : très bien expliquée par LLL France ici et montrée également là . Cela veut aussi dire qu’il y a des alternatives au biberon, en fonction de l’âge du bébé, comme le DAL (ou sonde) au doigt, la tasse à bec, la paille, voire d’autres encore à inventer, pourquoi pas ?

Donc, oui, il peut arriver qu’un bébé préfère le biberon pour l’une ou l’autre des raisons mentionnées plus haut. Si cela convient à la maman, tant mieux. Si ce n’est absolument ce qu’elle souhaite vivre il est important d’évoquer cette possibilité avec elle en amont pour être vigilant à ce que l’efficacité de bébé soit réelle, à la manière de donner le biberon voire au choix d’un autre moyen de lui donner son lait. Il est important aussi de l’aider à voir comment inverser la tendance et trouver le chemin qui lui conviendra.

En ce qui concerne l’allaitement maternel (comme dans de multiples autres domaines d’ailleurs…), on ne peut jamais dire jamais ou toujours. Chaque nouvelle histoire est une histoire à découvrir. Alors gardons-nous d’être dans la peur ou la certitude et avançons un jour après l’autre.

Je continue à rêver…

« Passe le au « bibi », ce sera plus simple ! »

Ah ce fameux, « bibi », « bib », « biberon » ! Si simple et si magique… Loin de moi l’idée de vouloir alimenter la « guerre » biberon vs sein : elle est totalement stérile, inutile et infondée. Le biberon est un outil qui peut rendre de grands services et celui qui l’a inventé a plutôt eu une bonne idée. Je ne serais même pas là pour en parler s’il n’avait pas existé (heu… remarquez, je dis n’importe quoi, j’aurais alors sûrement été allaitée 😉 ) J’ai seulement envie que l’on arrête d’énoncer le plus sérieusement du monde des vérités qui n’en sont pas.

La simplicité, signifie pour moi que l’on va droit au but, que l’on ne s’embarrasse pas de contraintes en tout genre, que l’on se pose le minimum de questions pour parvenir à son objectif.

bibrieurDans un certain sens, oui, le biberon est plus simple : on achète ce qu’il faut, on suit des recommandations précises sur une quantité de lait et un nombre de repas, et roule jeunesse ! Bébé est nourri. Dans un autre… j’ai vraiment du mal à y voir quoi que ce soit de simple : acheter et donc choisir (biberons, tétines, lait en poudre), chauffer, vérifier, donner, jeter, laver, puis recommencer au repas suivant ; que des verbes d’action qui me donne le tournis.

On ne m’ôtera pas de l’idée qu’allaiter est un truc de grosse paresseuse. Donc, d’une simplicité déconcertante.

Imaginez un peu, bébé numéro 1 arrive d’ici quelques semaines, et déjà vous vous dites, « finies les grasses matinées, terminés les week-end décidés au dernier moment, les nuits tranquilles, et puis tout ce bazar dont il faut s’équiper… », bref vous voyez bien quelque part tout le côté déplaisant de la belle aventure qu’est l’accueil d’un nouveau-né. Mais bon, c’est comme ça, il faut y passer, et puis c’est tout.

Et bien non, vous pouvez aussi imaginer les choses différemment.

Certes, bébé se réveille la nuit (je rappelle juste en passant que c’est totalement PHYSIOLOGIQUE et que jusqu’au moins 4 à 5 ans un enfant n’a pas le même rythme de sommeil qu’un adulte, qu’il soit allaité ou non) mais il suffit à maman de « rouler » d’un côté ou de l’autre, d’ouvrir un œil, de rassasier bout d’chou et hop ! C’est reparti pour un tour de sommeil. Quant à papa, lui, il n’a même pas à bouger une oreille et le lendemain il sera tout frais pour prendre la relève à un moment ou un autre. Si vous n’êtes décidément pas du matin ? Même scénario que pour la nuit et même nouveau plongeon dans les bras de Morphée 1 ou 2 heures de plus, en tout cas au cours de la première année. Pour ce qui est des escapades imprévues, aucun souci, quelques couches dans un sac et c’est parti !

Bref, allaiter, c’est simple. Sauf que cela ne l’est pas forcément dès le début, que cela peut être difficile, déroutant, effrayant même. Toutefois, le fait de savoir que cela peut devenir quelque chose de banal, facile et… simple fait luire une lumière là-bas, tout là-bas, au bout du tunnel. Une lumière qui donne envie de tenir bon, de chercher à ce que tout s’apaise, de trouver une solution, sa solution, celle qui convient à toute la famille. Je vous assure que le jeu en vaut la chandelle.

Une mention toute spéciale pour ces femmes qui ont choisi (ou parfois subi le fait) de « tire-allaiter » : tirer leur lait et le donner au biberon. Je ne peux que saluer leur persévérance et leur énergie tant leur tâche est loin d’être des plus simples…